Domaine de La Guérite, Gy (GE)

Un rosé pour la vie

Texte: Anick Goumaz, Photo: Richard Martinez

Philippe Meylan se souviendra toujours de sa première vinification: un rosé de Garanoir servi pour son mariage. Depuis, ce menuisier reconverti a relevé un gros défi, celui de reprendre le domaine familial composé de 85 ha de grandes cultures et de 9 ha de vignes.

Philippe Meylan nous reçoit chez lui, dans son local de dégustation ouvert uniquement sur demande. Sur la façade, un panneau invite à acheter en direct des œufs, de la viande, etc. En effet, depuis que ce menuisier reconverti a repris le domaine de son papa Gérald il y a deux ans, il gère non seulement 9 ha de vignes, mais aussi 85 ha de grandes cultures. Autant dire qu’on ne chôme pas, chez les Meylan. Malgré le défi de taille, Philippe n’a pas hésité à se lancer dans ses propres vinifications, alors que son papa vendait jusqu’ici toute sa récolte. Son premier millésime: un rosé de Garanoir servi à l’occasion de son mariage. «Nos invités ont aimé et moi j’ai pris du plaisir à l’élaborer». D’une pierre deux coups, il a ainsi débuté sa vie de jeune marié, mais aussi de vigneron-encaveur. «J’ai appris en discutant avec d’autres producteurs, tels que ma cousine, Sarah Meylan. Les changements sont arrivés petit à petit.» Avec la reprise, en 2022, auprès de Daniel Fonjallaz de 3,5 ha garnis de pas moins de 16 cépages et une nouvelle cave en location depuis cette année, le domaine fait effectivement un grand pas en avant. «J’ai sorti 15 000 bouteilles en 2022. Pour ce millésime, je vise 25 000.» Mais la quantité nous importe bien moins que la qualité des vins élaborés avec peu d’artifices. Les quatre vins naturels, le Doral et les rouges contiennent uniquement des levures indigènes et l’ensemble de la gamme totalise très peu de sulfites. Le travail des lies compte également. On remarque enfin l’appétence pour le Chasselas, décliné de quatre manières (en cuves, en fûts de chêne, avec macération pelliculaire et en Pét Nat, assemblé avec du Gamay). À la vigne, le Genevois soigne «les anciens». Il vend les raisins des plus jeunes plants et vinifie en priorité les vieilles vignes, comme ses ceps de Gamay. Il a fait le choix de l’agriculture biologique sur l’ensemble de ses surfaces, ce qui a impliqué des investissements conséquents pour les grandes cultures. Grâce aux dernières acquisitions, il dispose d’un terrain de jeu varié, dont deux parcelles sur territoire français – cette particularité est autorisée dans la réglementation de l’Appellation d’Origine Contrôlée Genève. «J’ai toutes les orientations. C’est intéressant pour comparer les différents comportements. Ça m’a aussi sauvé l’année dernière, car la grosse grêle du mois de juillet a engendré des dégâts sur mes parcelles du haut.» Hormis ces évolutions de taille, une chose demeure: le nom du domaine. «À l’époque, mon papa vendait déjà sa récolte sous le nom de «la guérite», en référence à celle qui trône dans nos vignes, envahie de roses grimpantes reproduites sur mon logo et mes étiquettes. Je me suis dit que tout changer n’était pas non plus mon but», explique-t-il en ponctuant son récit de son rire franc.

Nos coups de coeur

Gamay 2022

Les plus vieilles vignes du Domaine de La Guérite (plus de 45 ans) offrent un magnifique Gamay, vinifié en cuves. «J’amène de la complexité avec une macération préfermentaire à froid pendant environ dix jours.» Cette méthode lui donne des allures de crus du Beaujolais, avec un bouquet typique de petits fruits rouges teinté de banane. Bouche fraîche, tendue, fruitée, complexe, tirant sur la truffe.

Prix: 13 francs

Sauvignon Gris fût de chêne 2022

Ce Sauvignon Gris étonne sur plus d’un point: premièrement avec son cépage, encore rare sous nos latitudes. Puis, avec l’utilisation d’un fût de chêne du Caucase, également peu courant (il donne des notes fraîches de résineux, tout en harmonie avec des arômes d’amande). Enfin, c’est un vin naturel avec seulement cinq grammes de SO2. Son originalité et sa forte personnalité ne laissent pas indifférent.

Prix: 22 francs

Gamaret-Garanoir 2022

Maryline aime boire son Gamaret- Garanoir jeune, comme un «vin des copains», mais sa structure sur l’acidité et les tanins prometteurs nous donnent envie d’en oublier quelques bouteilles en cave. Voici donc un vin polyvalent, élevé en cuves et en barriques, «à 50/50», dominés par les fruits noirs, mais aussi les épices, un soupçon d’olive noire et une pointe de bois, pour la complexité.

Prix: 17 francs

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